Le sermon du New York Times à la France

Dans un édito publié le 1er avril, le célèbre quotidien américain s’en prend au gouvernement français pour son projet de loi sur le renseignement et à l’absence de contradiction des élus face au texte.

“Le Parlement doit rétablir un contrôle judiciaire sur les décisions qui touchent aux droits et aux libertés fondamentales des citoyens français”. C’est un souhait, une requête que formule le New York Times, inquiet que le projet de loi sur le renseignement ne cède trop de pouvoir à Manuel Valls et à ses successeurs. “Le projet de loi octroie un pouvoir extraordinaire au Premier ministre en lui donnant, à lui plutôt qu’aux juges, la possibilité d’approuver les demandes de mise sous surveillance issues des agences de renseignement”.

La tribune est signée de l’Editorial Board du journal, un groupe composé de 19 journalistes dont les domaines d’expertises sont différents et les opinions censées représenter celles du conseil d’administration, du rédacteur en chef, et de l’éditeur. Le New York Times appelle les députés français à ne pas voter le projet de loi actuellement en discussion à la Commission des lois de l’Assemblée nationale. Pour appuyer son propos, le quotidien américain cite le Conseil national du numérique (Cnnum) et s’inquiète que la France suive le mauvais exemple américain en matière de surveillance abusive et non-contrôlée. Lors d’un communiqué publié le 19 mars dernier, le Cnuum expliquait que “l’expérience américaine et les révélations d’Edward Snowden devraient nous conduire à concentrer le contrôle sur les outils techniques à disposition des services de renseignement. Le Conseil s’inquiète des moyens humains et techniques qui seront affectés à la nouvelle Commission de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) aux pouvoirs élargis”.

Le New York Times est évidemment sensible aux droits de la presse, selon lui attaqués par ce projet de loi. “Selon les termes du projet de loi, les journalistes risquent d’être surveillés de manière injustifiée par le gouvernement en faisant tout simplement des recherches sur l’Internet pour écrire leurs articles”. Le journal américain rejoint sur ce point Reporters sans Frontières, l’une des associations les plus virulentes envers cette loi sur le renseignement.

Selon le New York Times, tout aussi inquiétant que le projet de loi est l’apathie des parlementaires face aux mesures préconisées. Le journal n’en veut pas aux Français, encore sous le choc des attentats de Charlie Hebdo, et inquiets du nombre de leurs compatriotes partis faire le jihad, mais aux parlementaires, qui “ont le devoir de protéger les droits démocratiques des citoyens face à la coûteuse et intrusive surveillance du gouvernement”. Il est vrai qu’en France, la loi sur le renseignement ne fait pas de vagues et ne suscite pas de débats chez les parlementaires. Ce sont surtout des associations, La Ligue des Droits de l’Homme, l’Association des sites internet communautaires ou la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) et des représentants des forces de polices et judiciaires (l’Union des syndicats de la magistrature, l’Ordre des Avocats de Paris, la CGT police), qui s’opposent en France au contenu du texte défendu par Manuel Valls.

La tribune se termine par une incitation adressée aux députés : “les législateurs français ne devraient pas voter ce projet de loi, à moins que les juges retrouvent leur pouvoir de contrôler la surveillance gouvernementale, que les définitions vagues de qui constitue une menace terroriste soit enlevées du texte, et que la liberté de la presse soit protégée”.

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