1900, la naissance du mythe parisien

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En 1900, la Ville Lumière est à son apogée. On inaugure le pont Alexandre III, la gare d’Orsay, l’Exposition universelle et la première ligne de métro. Une exposition sur le Paris de la Belle Epoque, initialement présentée au Petit Palais, est à découvrir au Portland Art Museum dans l’Oregon à partir du 8 juin.

Cécilie Champy-Vinas, conservatrice du musée du Petit Palais, revient sur la genèse de l’exposition Paris 1900 : la ville spectacle (Paris 1900: City of Entertainment) et la naissance du mythe parisien.


France-Amérique : Pourquoi l’année 1900 représente-t-elle un tournant si important ?

Cécilie Champy-Vinas : Les années 1890-1910 correspondent à une période de prospérité économique et d’expansion démographique pour la capitale. En 1900, Paris compte près de trois millions d’habitants [contre 2,2 millions aujourd’hui] et accueille simultanément l’Exposition universelle et les Jeux olympiques. C’est une période de réels progrès : on découvre l’électricité, les premières voitures apparaissent dans les rues et la première ligne du métro parisien, entre la Porte de Vincennes et la Porte Maillot, est inaugurée. C’est aussi une période de vitalité artistique. Les vitraux d’Alfons Mucha, les affiches de Victor Prouvé et les entrées du métro dessinées par Hector Guimard illustrent le style art nouveau. Les artistes du monde entier viennent se former à Paris. La peintre américaine Marie Cassatt et ses compatriotes, les sculpteurs Paul W. Bartlett et John S. Conway, côtoient Edgar Degas, Paul Cézanne, Berthe Morisot et Auguste Rodin.

Cette période continue de fasciner. Quelles sont les traces visibles de cette époque ?

Nombre de monuments emblématiques de Paris ont été construits entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle. On peut citer la basilique du Sacré-Cœur et la Tour Eiffel, mais aussi le Petit Palais et le Grand Palais, la gare d’Orsay et les ponts d’Iéna, de l’Alma, des Invalides et Alexandre III. C’est à cette époque que Paris a pris la forme qu’on lui connaît aujourd’hui.

La Belle Epoque correspond également à l’émergence du mythe de la Parisienne, encore très présent aujourd’hui. D’où vient-il ?

Le mythe de la Parisienne précède la Belle Epoque. Au début du XIXe siècle, les romans de Balzac popularisent les grisettes, de jeunes ouvrières passementières, coquettes et galantes. La réputation d’élégance des femmes parisiennes culmine dans les années 1900. Il existe une importante littérature sur le sujet. On dit que les Parisiennes sont les femmes les mieux habillées au monde. Ce sont aussi celles qui marchent le mieux : elles savent relever leur robe pour ne pas salir leur habit sans pour autant exhiber leurs chevilles. A cette même époque, de grandes maisons de couture s’installent à Paris le long de la Rue de la Paix. On pense au couturier Charles Frederick Worth — qui a dessiné une cape du soir pour la comtesse Greffulhe, la Parisienne la plus élégante du moment — et à Jeanne Paquin, réputée pour ses robes du soir aux motifs XVIIIe siècle.

Henri Gervex, Une soirée au Pré-Catelan, 1909. © Musée Carnavalet, Paris

Une partie de l’exposition est consacrée à « l’envers du décor », le Paris des cabarets et des prostituées…

Nous avons appelé cette dernière partie « Paris, la nuit ». Le rayonnement de Paris est lié à sa vie nocturne. La capitale a la réputation d’être une cité exubérante, une Babel du vice. Ça se voit dans les beaux-arts de cette époque. Les cafés et les cabarets sont des lieux où les différentes classes de la société se rencontrent et se mélangent. Beaucoup d’aristocrates et de gens très chics venaient à Paris pour s’encanailler au Moulin Rouge ou au Chat Noir. Toulouse-Lautrec, né dans une famille noble du sud de la France, a passé toute sa carrière dans les cabarets et les bordels de la capitale. Degas a aussi beaucoup peint les actrices, les chanteuses et les prostituées.

Cette exposition présente une vision romantique de la France à laquelle sont attachés les Américains. Etait-ce un parti pris ?

L’exposition n’a pas été conçue pour faire plaisir aux Américains. Les six parties ont été imaginées de manière à reproduire l’atmosphère de l’Exposition universelle de 1900 et montrer comment le mythe parisien est né et s’est développé. Plusieurs musées parisiens ont contribué à évoquer la Belle Epoque. Le Palais Galliera, le Musée de la Mode de la Ville de Paris, a mis à disposition des tenues de soirées, mais aussi des tenues de jour, comme ces robes d’amazones que les femmes revêtaient pour monter à cheval. Un prêt du Musée Carnavalet, enfin, a permis de reconstituer un véritable café parisien de la Belle Epoque. Les chaises, les banquettes, les tables et les lampes du Café de Paris, dans le quartier de l’Opéra, sont un magnifique exemple du style art nouveau !


Paris 1900: City of Entertainment
Du 12 octobre au 6 Janvier 2019

Frist Art Museum
919 Broadway
Nashville, TN 37203
www.fristartmuseum.org

Du 1er mars au 12 mai 2019
Cincinnati Art Museum
953 Eden Park Drive
Cincinnati, OH 45202
www.cincinnatiartmuseum.org

Du 8 juin au 8 septembre 2019
Portland Art Museum
1219 SW Park Avenue
Portland, OR 97205
www.portlandartmuseum.org

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