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Les cours en ligne sont-ils l’avenir des départements de français ?

Aux Etats-Unis, les départements de français menacés de fermeture trouvent leur salut sur le web. En Géorgie, quatre universités se sont récemment regroupées pour créer le premier Bachelor’s Degree de français (l’équivalent d’une Licence) entièrement en ligne.
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© Mimi Thian

Chaque lundi à 21 heures, Dorothée Mertz-Weigel donne rendez-vous à ses élèves de français pour un cours de conversation avancée. La discussion se déroule en ligne, via le logiciel Skype. Employés de bureau, militaires ou mères au foyer, les étudiants n’ont pas le temps de se déplacer sur le campus d’Armstrong State University à Savannah (Géorgie) pendant la journée. Pour rendre ses cours accessibles à tous, Dorothée Mertz-Weigel mise sur la technologie.

Armstrong State University et trois autres universités publiques de Géorgie (Valdosta State University, College of Coastal Georgia et Clayton State University) ont récemment signé un accord instaurant le programme eFrench, le premier Bachelor’s Degree de français entièrement en ligne. En mutualisant leurs ressources, les quatre établissements espèrent accroître le rayonnement de leurs cours et attirer de nouveaux étudiants.

En raison d’effectifs trop réduits, Armstrong State University a mis fin à son diplôme de français à la fin des années 1990. Pour des raisons similaires, les cours de français ont été supprimés en décembre dernier à Eastern Kentucky University, en février 2016 à Concordia College, dans le nord-ouest du Minnesota, et en octobre 2014 à l’Université du Maine, dans le nord-est des Etats-Unis.

« Le français est une langue qui doit constamment justifier sa présence en produisant des diplômés », déplore Ofelia Nikolova, responsable du département de lettres classiques et modernes et coordinatrice du programme eFrench à Valdosta State University. Cette université du sud de la Géorgie compte dix-neuf étudiants en français, dont sept inscrits dans le programme en ligne. Deux à trois étudiants reçoivent un Bachelor’s Degree de français chaque année. Et « zéro » certaines années, reconnaît Ofelia Nikolova. « Nous avons créé ce diplôme en ligne pour survivre. »

Groupes de discussion et examens en ligne

Depuis sa création en août 2015, une trentaine d’étudiants se sont inscrits au programme de français en ligne. Plusieurs d’entre eux suivent leurs cours depuis un autre Etat que la Géorgie : la Floride, la Caroline du Nord, la Virginie ou encore Washington D.C. Les prérequis et conditions d’entrée sont similaires à ceux d’un diplôme classique, mais les frais de scolarité sont variables. Comptez 24 000 dollars pour un Bachelor’s Degree en ligne et environ 45 000 dollars pour un Bachelor’s Degree classique.

Originaire de l’Indiana, Hilary Bataille vit à Chapel Hill, en Caroline du Nord. Elle s’est inscrite au programme eFrench au printemps dernier pour « progresser en français » et « pouvoir parler avec [son] mari », originaire de Toulouse. Cette maman de trois enfants suit deux cours de français par semestre – l’équivalent de six heures par semaine – et fait ses devoirs le soir, après le dîner.

Les élèves travaillent à la maison, mais les professeurs tiennent des permanences en ligne et animent des groupes de discussion. Un atelier hebdomadaire offre aux étudiants la possibilité de converser pendant une demi-heure avec une intervenante francophone. Un logiciel de messagerie leur permet de partager avec leur professeur et leurs camarades des textes, présentations PowerPoint et messages audio ou vidéo. Les étudiants sont libres de passer leurs examens en ligne ou sur le campus de leur université.

« Les cours en ligne exigent des étudiants qu’ils soient motivés mais offrent une meilleure visibilité à notre département », apprécie Dorothée Mertz-Weigel, coordinatrice du programme eFrench à Armstrong State University. Un étudiant qui a rejoint le programme au moment de sa création a reçu son diplôme en décembre dernier. A Chapel Hill, en Caroline du Nord, Hilary Bataille espère être diplômée en 2018. Elle se réjouit de ses progrès et se félicite d’avoir trouvé un programme qui lui laisse le temps de s’occuper de ses enfants. « Sans un tel cursus, les étudiants comme moi n’auraient pas l’occasion d’apprendre le français à l’université ! »