Des cartes pour revivre le Paris des Années Folles

Cartographier la culture du Paris des années 1920, voilà le projet ambitieux de Louis Epstein, professeur de musicologie au St. Olaf College, dans le Minnesota. Mené avec une poignée d’étudiants motivés, ce projet de géographie culturelle a pour objectif de créer des cartes interactives des cinémas, bibliothèques, librairies et salles de concerts parisiennes des Années Folles.

Qu’est-ce que les cartes peuvent nous apprendre sur la musique ? C’est une question que s’est posée à maintes reprises Louis Epstein, professeur de musicologie au St. Olaf College, dans le Minnesota. « Depuis tout petit, j’adore les cartes de géographie », explique-t-il. « Je me suis toujours demandé pourquoi on ne les utilisait jamais dans l’enseignement de la musique. »

Au cours de l’été 2015, le musicologue lance son projet : créer des cartes en ligne qui référenceraient les cinémas, bibliothèques, librairies et salles de concerts du Paris des années 1920. Le professeur n’a pas choisi cette époque au hasard. « Au début du XXe siècle, la capitale française est un passage obligé pour les artistes et les musiciens du monde entier, attirés par l’atmosphère bohème et créative de la ville », explique-t-il. « Paris fût notamment le siège de trois compagnies de ballet très réputées, comme les mémorables Ballets Russes. » Musicologue francophile, spécialiste des Années Folles, le professeur démarre naturellement son projet à Paris.

Quatre élèves triés sur le volet sont chargés de recenser les évènements culturels qui seront placés sur les cartes. Tout support peut constituer une source : un livre, un journal, une lettre, une photographie, un film, un enregistrement sonore, ou encore un document officiel. « C’est très important d’entrecroiser les informations », explique Louis Epstein. « Parfois, on trouve des sources qui en contredisent d’autres. Ce n’est que lorsque l’information est certifiée que l’on peut la placer sur la carte. »

« Intégrer la musique originale des évènements cartographiés »

Les cartes référencent le studio du 39 rue Descartes où écrivait Ernest Hemingway, le premier emplacement de la Librairie Américaine à Paris dans le VIIIe arrondissement ou encore la première librairie Shakespeare and Company. L’internaute suit le poète afro-américain Langston Hughes lors de sa première journée à Paris, en 1924, de la Gare du Nord à l’Arc de Triomphe en passant par le Louvre et le Moulin de la Galette. Une autre carte répertorie les salles de cinéma : l’Espace Saint-Michel, par exemple, l’une des plus vielles salles de cinémas de Paris. Mais aussi les salles de concerts. Le 1er Octobre 1924 à 19h, un concert des compositions de Beethoven et Chopin a été donné à la Salle des Ingénieurs Civils, dans le IXe arrondissement.

En 2015 et 2016, le musicologue s’est concentré sur le référencement d’œuvres classiques. « J’aimerais pouvoir élargir le style des performances culturelles que l’on référence mais il y a un manque crucial d’informations », explique-t-il. « Par exemple, le jazz était très écouté à l’époque, mais c’était des rendez-vous populaires et informels. C’est donc plus difficile de trouver des informations précises sur ce type d’évènements. »

Convaincu de l’intérêt pédagogique de son projet, Louis Epstein est bien décidé à enrichir son étude, semestre après semestre, avec de nouveaux étudiants. Le musicologue a déjà des objectifs pour 2017 : « J’ai envie de créer de nouvelles cartes et intégrer la musique originale des évènements cartographiés. Mais pour le moment on a encore des problèmes avec les droits d’auteurs. »