François Hollande à Cuba pour marquer l’histoire et conquérir des marchés

Premier chef d’Etat occidental à se rendre à Cuba depuis l’annonce du dégel entre l’île et les Etats-Unis, François Hollande effectue lundi une visite historique à La Havane pour défendre les intérêts français et européens dans un pays qui aspire à l’ouverture économique.

L’idée de ce voyage « c’est que la France soit la première au nom de l’Europe et parmi les pays occidentaux à pouvoir dire aux Cubains que nous sommes à leur côté s’ils décident eux-mêmes de franchir les étapes nécessaires vers l’ouverture », a expliqué M. Hollande à des journalistes qui le suivent pour cette tournée de cinq jours dans la Caraïbe.

Sur la voie de la normalisation de ses relations avec les Etats-Unis mais aussi avec l’Europe, Cuba est également engagée dans une « actualisation » progressive de son économie héritée du modèle soviétique qui est aujourd’hui à bout de souffle.

Le président français doit rencontrer lundi soir son homologue Raul Castro, qui a succédé à son frère Fidel dès 2006. La présidence cubaine donnera également un dîner officiel dans la soirée. L’Elysée a par ailleurs dit sa « disponibilité » pour un entretien avec le père de la révolution cubaine, mais celui-ci n’a pas été confirmé par La Havane. Très serré, le programme de cette visite d’une journée ne prévoit pas de conférence de presse.

Les Droits de l’Homme « seront évoqués »

« J’arrive ici à Cuba avec beaucoup d’émotion car c’est la première fois qu’un président de la république française vient à Cuba », a déclaré M. Hollande, jugeant cette visite « d’une certaine façon historique » même si « Raul et Fidel Castro ont bien-sûr (déjà) rencontré des présidents français ». Avec cette visite, le président français réalise également un « coup » diplomatique en devançant les autres chefs d’Etat occidentaux séduits par les perspectives d’ouverture à Cuba depuis l’annonce choc fin 2014 du dégel avec Washington. Paris entend capitaliser sur des liens resserrés voici un peu plus d’un an par une visite de son ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, sur l’île.

Depuis, la France s’est positionnée en première ligne dans le rapprochement entre l’UE et la Havane, que les deux parties souhaitent voir se concrétiser d’ici à la fin de l’année. Au sujet des droits de l’Homme, thème sur lequel le régime cubain est souvent ciblé, M. Hollande a indiqué qu’il serait « nécessairement évoqué ».

Son premier geste lundi matin a d’ailleurs été de remettre la légion d’honneur au cardinal Jaime Ortega, qui a notamment joué un rôle de médiation pour favoriser la libération de prisonniers politiques en 2010. « Je parlerai des droits de l’Homme car chaque fois qu’il y a des prisonniers politiques, chaque fois qu’il y a des manquements à la liberté, la France ne reste pas bouche cousue », a insisté le président français.

Les marchés latino-américains dans le viseur

Dixième partenaire économique de l’île, la France veut renforcer sa présence sur le marché cubain et ne pas laisser passer le train de l’ouverture économique à Cuba. De nombreux chefs d’entreprises accompagnent M. Hollande sur cette tournée au sein d’une délégation comptant pas moins de sept ministres et secrétaires d’Etat.

Quelques contrats doivent être signés lundi, mais « ce n’est pas tant le montant qui va compter que d’accéder à des marchés latino-américains », a souligné le président français. M. Hollande a rappelé le soutien de la France à Cuba au sujet de l’embargo américain qui pénalise l’île depuis 1962. Chaque année depuis 1991, Paris vote en faveur de la résolution demandant la levée de l’embargo à l’Assemblée générale de l’ONU.

« Cuba veut maintenant passer à une autre phase, une autre période, un autre temps pour cette île qui a été victime d’un embargo. Malgré le geste (du président américain Barack) Obama, il y a encore des mesures qui empêchent les relations commerciales » avec de nombreux partenaires, a plaidé M. Hollande avant son départ de la Guadeloupe.

Depuis l’annonce du dégel avec Cuba mi-décembre, le président démocrate Barack Obama a demandé au Congrès, contrôlé par les républicains, de travailler à la levée de l’embargo car lui seul a la prérogative institutionnelle de le faire. « Il y a des liens historiques, des liens profonds entre le peuple français et le peuple cubain. Il y a un attachement à l’indépendance, à l’aspiration à avoir face aux tribulations du monde la volonté de peser. Et aujourd’hui cela prend une signification particulière après ce qu’a enfin décidé le président Obama », a déclaré M. Hollande dimanche soir.

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