La France plus raciste que les Etats-Unis ?

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A en croire un éditorial du New York Times publié le 28 décembre dernier, les Français seraient des racistes qui s’ignorent, tandis que les Américains auraient au moins le mérite de reconnaître les discriminations infligées aux Afro-Américains.

Cette thèse se fonde sur les mésaventures d’une journaliste française d’origine africaine, Rokhaya Diallo, dont on a parlé en Amérique et pratiquement pas en France. Madame Diallo aurait été évincée du Conseil national du numérique, un comité consultatif comme il en existe beaucoup autour de chaque gouvernement, chargé de réfléchir à l’impact d’internet sur la société. Cette exclusion aurait été provoquée par les positions publiques de Madame Diallo qui dénonce le « racisme institutionnel », voire le « racisme d’Etat », qui régnerait en France.

On ne sait pas si son exclusion est vraiment due à ses positions politiques, mais c’est ce que le New York Times et Madame Diallo veulent nous faire croire. En vérité, Madame Diallo n’est pas seule en France à dénoncer le racisme et il n’est pas interdit d’en tenir l’Etat pour responsable. En revanche, il est abusif de dénoncer un « racisme d’Etat » car les gouvernements de toutes tendances ne cessent de lutter contre le racisme par de multiples lois. La grande différence entre la France et les Etats-Unis ne me paraît pas le racisme, difficile à mesurer, mais la différence d’approche entre nos deux pays. En France, le recensement ethnique étant interdit, on ne sait pas quantifier la présence ou non des « minorités » dans les emplois publics ou privés ou dans les écoles et les universités. Aux Etats-Unis, c’est le contraire, ce qui a conduit à des politiques actives d’affirmative action (ou discrimination positive) dans les années 1960 et aujourd’hui de « soutien à la diversité ».

Le New York Times regrette donc que la France n’adopte pas la politique américaine, ce qui supposerait d’abandonner la notion des citoyens égaux devant la loi. Mais la politique américaine de la diversité n’est pas un succès total, loin s’en faut, et la politique française non plus. Des Français, dont l’ancien ministre Azouz Begag, seraient favorables à l’affirmative action en France et des Américains, y compris dans les minorités — le sociologue afro-américain Thomas Sowell, par exemple — militent pour l’abandon de cette notion de diversité aux Etats-Unis. Dans les deux cas, le débat est souhaitable, mais de là à faire de Madame Diallo une martyre, le New York Times exagère.

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