“La Tête haute” en salles américaines

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Depuis l’enfance, Malony (Rod Paradot, César 2016 du Meilleur espoir masculin) est un garçon à la dérive, balloté par la justice. De chambres d’audience en centres de redressement, le film suit ses va-et-vient dans le bureau de la juge pour enfants Blaque (Catherine Deneuve), pilier d’autorité républicaine à l’instinct maternel. Face à l’éducation déficiente d’une mère célibataire (Sarah Forestier), c’est le combat de la famille éducative et du juge qu’Emmanuelle Bercot, passionnée par les questions de justice, met en scène.

“Mon oncle, qui était éducateur, m’a raconté qu’il s’était attaché à un gamin très mal barré dans la vie. Avec une juge des enfants proche de la retraite, ils se sont battu pour sortir ce gosse de la spirale de délinquance”, explique la réalisatrice, de passage à New York pour le festival Rendez-Vous with French Cinema. L’anecdote a servi de point de départ au scénario du film. L’alter ego de Malony dans le film, l’éducateur spécialisé Yann (Bruno Magimel), lui-même ancient délinquant revenu de loin, tente par tous les moyens de remettre sur les rails son protégé, qui ne semble aucunement vouloir s’en sortir.

“J’ai d’abord fait de l’observation sur le terrain dans des centres éducatifs et des établissements pénitentiaires pour mineurs pour crédibiliser le film avec des éléments concrets comme le comportement, l’habillement, les gestes et le langage de ces ados délinquants”, poursuit Emmanuelle Bercot. “J’ai ensuite lu beaucoup d’ouvrages sur la justice des mineurs pour bien maîtriser le sujet qui relève du code pénal et je me suis rendue au tribunal des enfants de Paris pendant plusieurs semaines, ainsi que dans les bureaux des juges. Une fois mon récit circonscrit, je suis passée au stade de l’écriture en autorisant l’incursion de la fiction pour étoffer les scènes et approfondir par le cinéma ce que j’ai pu observer dans le réel.”

Par son thème, le film évoque Sweet Sixteen du réalisateur anglais Ken Loach pour l’adolescence torturée. On songe aussi à l’esprit des frères Dardenne pour la fibre sociale réaliste et bien sûr, au récent film Mommy du québécois Xavier Dolan pour le thème de la violence juvénile incontrôlable. “Le rapprochement est inévitable. Les deux films s’intéressent à des ados écorchés. Mais je montre dans mon film ce que Xavier Dolan a laissé hors-champ. Il filme son ado dans son milieu familial, on ne voit jamais aucune structure judiciaire autour de l’enfant. Son personnage est incontrôlable mais néanmoins en liberté, alors que Malony, dans La Tête haute est toujours rattrapé par la justice et enfermé, ou sur le point de l’être.”

Paradoxalement, l’acteur Rod Paradot “n’est absolumment pas violent dans la vraie vie”, poursuit Emmanuelle Bercot. “Pour obtenir un effet de réalisme, j’ai vraiment dû le pousser à bout, provoquer chez lui des crises de colère ultra violentes. Ses pétages de plomb à l’écran me sont en fait destinés.” Parfait inconnu avant le film, le jeune acteur répéré dans une classe de CAP de menuiserie, tient le film sur ses épaules. Une belle première.

La tête haute, d’Emmanuelle Bercot. Avec Catherine Deneuve, Sarah Forestier, Rod Paradot, Benoît Magimel. 2h. En français sous-titré en anglais.

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