Simon Pagenaud a remporté dimanche les 500 miles d’Indianapolis, la plus célèbre course automobile américaine. Il est le premier Français à décrocher le titre depuis plus d’un siècle.
La dernière fois qu’un Français s’est illustré à Indianapolis, la Première Guerre mondiale n’avait pas encore commencé et les pilotes ne portaient pour protection qu’un serre-tête de cuir et une paire de lunettes. Sur une gravure de presse annonçant sa victoire le 30 mai 1914, René Thomas ressemble à un aviateur, moustachu au volant de son bolide Delage Type Y. Il boucla les 200 tours de piste en 6 heures, 3 minutes et 45 secondes, une moyenne de 133 kilomètres/heure, et remporta la cagnotte de 20 000 dollars !
René Thomas (à gauche) dans sa voiture Delage en 1914. © Indianapolis Motor Speedway
La course des 500 miles (805 kilomètres) d’Indianapolis, surnommée “Indy 500” en anglais, est l’un des trois évènements automobiles les plus prestigieux au monde avec le Grand prix de Monaco et les 24 heures du Mans. C’est aussi le plus ancien : les constructeurs automobiles — et les pilotes — s’y affrontent depuis 1911 sur un circuit rectangulaire pavé de briques (et d’asphalte depuis les années 1930). Une épreuve d’endurance impitoyable.
Le 30 mai 1913, Jules Goux devient le premier Français sacré à Indianapolis. Natif de Valentigney dans le Doubs, il s’impose au volant d’une Peugeot L76 en 6 heures et 35 minutes. Une victoire permise par les bulles du champagne, à en croire la presse de l’époque. Non contents de refaire le plein d’essence ou de changer un pneu, le Français et son mécanicien profitaient de leurs arrêts aux stands pour se désaltérer. Le journaliste de l’Indianapolis Star comptera six bouteilles de champagne — et une septième pour fêter l’arrivée !
“Les chauffeurs de l’Ancien monde”
L’année suivante, quatre voitures françaises terminent la course dans le top 5 : deux Delage, dont celle du vainqueur René Thomas, et deux Peugeot. C’est un triomphe pour les constructeurs tricolores et un choc pour les Américains. En témoigne le compte-rendu publié dans le magazine automobile The Horseless Age : “Moroses et le cœur gros, cent mille Américains passionnés de course automobile se sont effondrés au circuit d’Indianapolis samedi dernier après avoir assisté à l’une des défaites les plus dévastatrices jamais administrée aux bolides américains par les chauffeurs de l’Ancien monde”.
Gaston Chevrolet (á droite), vainqueur à Indianapolis en 1920. © Indianapolis Motor Speedway
Un autre Français s’imposera à Indianapolis en 1920 : Gaston Chevrolet. Il est né à Beaune en Bourgogne et a rejoint son frère, mécanicien et futur fondateur de la marque Chevrolet, aux Etats-Unis. Mais Gaston a demandé la nationalité américaine en 1914 et c’est en tant que citoyen américain qu’il court à Indianapolis le 31 mai 1920 et remporte l’épreuve. Depuis lors, l’événement a été dominé par les pilotes américains.
Jusqu’à cette année. Simon Pagenaud, natif de Montmorillon et installé aux Etats-Unis depuis 2006, s’est imposé en 2 heures, cinquante minutes et 39 secondes. Clin d’œil de l’histoire, il pilotait une voiture Chevrolet ! Une victoire historique applaudie par Donald Trump, qui a appelé le pilote sur son téléphone portable aussitôt après l’arrivée avant de renouveler ses félicitations sur Twitter : “J’ai vu Simon courir l’une des plus grandes courses dans l’histoire de ce sport ! Je les verrai tous les deux [Simon Pagenaud et Roger Penske, le propriétaire de son écurie] et leur équipe à la Maison Blanche !”