Deux motards français se sont donnés pour mission de rapporter aux Etats-Unis une Harley-Davidson de 1918 débarquée en France avec les troupes américaines pendant la Première Guerre mondiale.
Les deux Français avalent l’Interstate 65 en direction de Nashville. Lancé à 90 km/h sur une Harley-Davidson centenaire, Pierre Lauvergeat ouvre la route. Il est suivi de près par son compagnon d’aventure, Christophe de Goulaine. Au volant d’une fourgonnette, celui-ci joue le rôle d’observateur et d’ange gardien : il veille à la sécurité du pilote et de sa monture. La moto, construite en 1918, est capricieuse. “Elle pétarade, elle fume, elle perd de l’huile et de temps en temps un boulon”, explique Christophe de Goulaine. “Il y a quelques jours, on a passé quarante-cinq minutes sur le bas-côté à chercher une pièce de la taille d’un dé à coudre.”
Les motards se relayent ainsi depuis qu’ils ont quitté Mobile, dans l’Alabama, le 21 juin dernier. Leur objectif ? Traverser les Etats-Unis. Les équipiers, originaires de la région de Nantes et passionnés de mécanique ancienne, ont passé six mois à restaurer la moto. Mais l’engin est resté “dans son jus”, assure Christophe de Goulaine. Toutes les pièces sont d’époque. Le cuir de la selle est patiné et le carter du moteur porte encore l’inscription “Milwaukee, U.S.A.”.
© Christophe de Goulaine/Instagram
La ville de Milwaukee (Wisconsin), située au nord de Chicago sur le lac Michigan, héberge le siège de Harley-Davidson depuis 1903. C’est la prochaine étape des Français après Nashville et Indianapolis : ils participeront aux célébrations du 115e anniversaire de la marque le 26 juillet prochain. Du 3 au 12 août, ils seront à Sturgis dans le Dakota du Sud, où ils prendront part au plus grand rassemblement de motos aux Etats-Unis, avant d’emprunter la Route 66 en direction de Los Angeles.
Un périple de 8 000 kilomètres
“On a déjà parcouru 1 800 kilomètres et la moto tient bon”, témoigne Christophe de Goulaine. Au printemps dernier, pour essayer leur engin restauré, les deux pilotes se sont rendus au cimetière militaire américain de Bony, dans la Somme. Une forme de pèlerinage. “Devant les 1 844 croix de marbre blanc alignées sur la pelouse parfaitement tondue, on a pris la mesure du sacrifice de ces jeunes Américains tombés pour libérer un pays qui n’est pas le leur.”
© Olivier Touron/Divergence
La moto, surnommée “Bony” pour l’occasion, porte haut les couleurs de l’amitié franco-américaine. Les drapeaux français et américains fichés sur le garde-boue avant et la tenue rétro des deux motards — blousons de cuir, casques bols et lunettes d’aviateurs — attirent les curieux. En Floride, la concession Harley-Davidson de Jacksonville a prêté son atelier aux Français le temps de faire des réparations. Dans l’Alabama, un passant n’a pas hésité à proposer son pick-up pour remorquer la moto en surchauffe. “La France et l’Amérique sont un vieux couple”, philosophe Christophe de Goulaine. “Ils s’aiment mais oublient de se le dire.”
En moto sur les Champs-Elysées
Le retour en France est prévu le 17 septembre. Les pilotes prendront l’avion depuis Los Angeles, mais Bony sera rapatriée par camion puis par bateau. A l’aller, elle a fait la traversée à bord du cargo qui assure le transport des pièces d’A320 entre Saint-Nazaire et l’usine Airbus de Mobile (Alabama). Un autre moyen de rendre hommage aux doughboys qui ont débarqué en France le 26 juin 1917.
Les deux motards, soutenus par la mission du centenaire en France et son homologue aux Etats-Unis, la World War I Centennial Commission, comptent descendre les Champs-Elysées lors des cérémonies de commémoration du centenaire de l’armistice, le 11 novembre prochain. “Les hommages ne se résument pas à une minute de silence devant un monument aux morts. Notre mission est de faire du bruit pour remercier les soldats qui se sont battus pour la France !”
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