Tous les Américains ne s’appellent pas William, George – et encore moins Barack. La variété des first names aux Etats-Unis est à la mesure de la diversité des origines des habitants de ce pays d’immigrants. Certains parents, toutefois, ont de drôles d’idées. Ils sont de plus en plus nombreux à baptiser leurs enfants Colt, Remington, Ruger ou Gunner (“artilleur“). Certes, on ne dénombre que quelques centaines de petits Colt, peu de choses au regard des quelque 4 millions de bébés qui naissent chaque année, mais la cote grandissante de ce type de prénoms en dit long sur la fascination des Américains pour les armes à feu.
D’autres citoyens des Etats-Unis s’évertuent à trouver un nom encore plus original à leur rejeton, aucune loi, comme dans la plupart des pays du monde, ne fixant de limite à leur imagination. Parmi les plus extravagants attribués en 2013, le site eBabyNames a relevé Nimrod, Zamzam, Bush, Moo, Dzyre et même ZZyzx (qui se prononce Zay-Zix).
La recherche de la singularité onomastique est cependant l’une des choses les mieux partagées au monde. À tel point que dans l’État mexicain de Sonora, proche de la Californie, les autorités ont dressé une liste de 61 prénoms interdits. Parmi ceux-ci, Terminator, Burger King, Twitter ou encore Hitler. À l’autre bout du monde, en Nouvelle-Zélande, les Lucifer, Anal, Fish et Chips (pour des jumeaux) ont été prohibés par la justice.
En Angleterre, où l’on reste en général plus classique, les services d’état-civil relèvent une vague d’enregistrements pour des Peyton, Elvina, Wyatt, Kendra. Le succès de la série Games of Thrones, on l’aura compris, n’est pas étranger à cet engouement pour les prénoms de style médiéval. Khaleesi, inspiré par le titre de l’une des héroïnes de la série, connaît pour sa part une popularité croissante aux États-Unis.
En France, où l’on note aussi déjà quelques Khaleesi, Emma, Lola, Chloé, Inès, Léa sont les prénoms féminins les plus en vogue en 2014. Nathan, Lucas, Léo, Gabriel, Timéo formant le quinté de tête chez les garçons. Mais certains papas et mamans font des choix beaucoup moins convenus. Fidéline, Jénisse, Loréole ou Vitaline ont pour particularité d’être inventés tout en ressemblant à de vrais mots. Le plus souvent ceux-ci sont repris tels quels. Passe encore pour Sésame, Néon, Paprika, Oasis, Neige, Princesse. Pourquoi pas, non plus, Vercingétorix, Monalisa, Magellan ou Casanova ? Mais on imagine les moqueries que peuvent susciter les Google, Burger, Playboy tout autant que les Dimanche, Yoga, Otorino, Opportune.
On sait qu’en France l’état-civil, comme presque partout ailleurs, y compris aux États-Unis, peut cependant refuser un prénom susceptible de porter préjudice à l’enfant. Cela a été le cas, apprend-on, pour Téléphérique, Fourchette, Gaufre et les très osés Clitorine et Vagina. Mais les prénoms lettres sont acceptés, et des enfants ont été baptisés A, L, M ou X.
Les prénoms les plus populaires au Québec ? Léa et William. Mais, ici aussi, les incongruités ne sont pas rares. Sur le site de la Régie des rentes (l’équivalent de l’Assurance retraite en France), on peut relever, entre autres, Soda, Arthur V, Alaska, Ouais, Radin, Hope Blessing, Betzael Shakespeare, Princesse Sisi Kapin.
On ne plaisante pas avec le sujet en Arabie saoudite. En mars dernier, le ministre de l’Intérieur a publié une liste de cinquante prénoms interdits. Certains tels que Sandy, Alice ou Linda sont jugés non islamiques. D’autres comme Malika (reine) ou Amir (prince) sont bien islamo-compatibles, mais leur connotation royale les rend blasphématoires. Reste le cas de Benyamin. C’est le prénom que portait le dernier des fils de Jacob, personnage biblique vénéré par les musulmans. Mais c’est aussi le patronyme de l’actuel Premier ministre israélien, qui, lui, est loin d’être en odeur de sainteté du côté de Riyad.
Il est courant d’entendre parler de liens secrets entre le caractère d’un être et son prénom. Ce dernier pourrait même influencer le destin de l’individu concerné. En Irak et en Syrie, cette hypothèse est vécue comme une terrible réalité. Mieux vaut ne pas se prénommer Abou Bakr, Omar ou Othman, du nom des trois premiers califes de l’islam, références majeures pour les sunnites, lorsque l’on est contrôlé par des soldats ou des miliciens chiites. Mais si on s’appelle Ali, Hassan, Hussein, les trois grandes figures du chiisme, on dévoile sa confession à ses risques et périls. Alors, beaucoup de Syriens et d’Irakiens changent leur prénom et en adoptent un neutre comme Abdallah (ou Mohammed), utilisé par les adeptes des deux branches de l’islam.
Il est vrai qu’un prénom comme Jihad n’est pas facile à porter non plus, même s’il ne signifie pas, comme on le dit trop souvent, “guerre sainte“, dans sa signification première du Coran mais “effort sur soi“. On compte pourtant des centaines de Jihad en France.