Les expatriés américains rivalisent d’ingéniosité pour perpétuer la tradition de Thanksgiving à l’étranger. Un grand nombre de Parisiens s’y sont aujourd’hui convertis et célèbrent cette journée d’action de grâce en famille, entre amis, à la maison ou à l’église.
Le quatrième jeudi de novembre est l’une des rares dates que tous les Américains réservent. Aux Etats-Unis, ils parcourent en moyenne 400 kilomètres pour célébrer Thanksgiving en famille ou entre amis autour d’un repas traditionnel. Parmi les incontournables, la dinde accompagnée d’une purée de pommes de terre, de patates douces et de canneberges, mais aussi la tarte aux noix de pécan ou au potiron.
Pour la communauté américaine à Paris, pas question de surseoir à la tradition. « En France, le quatrième jeudi de novembre n’est pas férié », rappelle Jean-Noël Castanet, fondateur et propriétaire depuis 1990 de l’épicerie américaine The Real McCoy, située rue de Grenelle à Paris, dans le VIIe arrondissement. « De fait, les expatriés célèbrent d’ordinaire Thanskgiving le week-end qui précède et celui qui suit. »
Camilla Radford-Furman, une Américaine de 62 ans, professeur de violon, précise : « Je suis obligée d’organiser deux repas : un premier assis, en petit comité de six à huit personnes pour mes amis américains qui veulent absolument célébrer Thanksgiving le jour J. Et un second repas moins conven- tionnel le samedi, sous forme de buffet, au cours duquel j’accueille une trentaine de convives. »
Originaire de l’Ohio, Rachel Moeller, arrivée en France il y a une dizaine d’années, a ouvert son restaurant de cuisine tradition-nelle américaine Rachel’s il y a deux ans, dans le quartier très branché du Marais. Depuis, son dîner de Thanksgiving affiche complet : « Nous avons accueilli 120 personnes l’an dernier ! », s’étonne la restauratrice. « A Paris, les appartements sont plus petits qu’aux Etats-Unis. Les Américains ne possèdent pas de grandes maisons de famille et sortent plus facilement partager un repas à l’extérieur », décrypte son associée Birke Moeller 9sans lien de parenté).
Kim Ball, 48 ans, met quant à elle un point d’honneur à accueillir ses amis chez elle. « La tradition veut que l’on passe la journée à préparer le repas, à rôtir la dinde et à se détendre entre amis », raconte cette responsable des relations de presse et de la communication internationale de l’agence de pub américaine Ogilvy & Mathers, à Paris. « C’est un moment intime. A chaque Thanksgiving, nous recevons entre trente et quarante invités. Un restaurant au coin de la rue nous prête des tables et des chaises pour que l’on puisse asseoir tout le monde à la maison. »
Une fête étudiante
Trop nombreux, les étudiants de l’American University of Paris n’ont d’autre choix que d’investir le sanctuaire : la chapelle et le théâtre de l’Eglise Américaine voisine, situés dans le VIIe arrondissement. « Nous réunissons entre 400 et 500 personnes », commente Kevin Fore, doyen des étudiants. « Le staff de l’université prépare la dinde et la farce, sans jus de viande pour les végétariens, et nous demandons à chacun d’apporter un plat, souvent un dessert. »
Thanksgiving est une aubaine pour les épiciers américains de la capitale. « Nous vendons près de 300 dindes pour l’occasion », assure Jean-Noël Castanet. « Nous les fournissons déjà cuites pour les repas d’équipes des grosses entreprises américaines comme Microsoft Paris. » Car la préparation du repas est un défi. Les standards américains imposent des volailles extra-larges, une dizaine de kilos pièce ! Les formats français, eux, sont trois fois moins imposants et les dimensions des fours parisiens pas toujours adaptées… « Ça a longtemps été un casse-tête », lance Camilla Radford-Furman. « Mais j’ai trouvé la solution : plutôt qu’une dinde entière traditionnelle, je sers des roulés d’escalope de dinde farcis cuits à la poêle ! »
Au prix de quelques entorses, la tradition américaine a donc de belles heures devant elle ! Lors de ces repas yankees, la moitié des convives sont en réalité… français. « Mes amis parisiens ont tous vu des repas de Thanksgiving à la télévision et sont curieux de vivre ce moment en vrai », poursuit Camilla Radford-Furman. Kim Ball confirme : « 98 % de nos invités sont français ». A l’université américaine, seuls 50 % des étudiants sont originaires des Etats-Unis mais, précise Kevin Fore, « tous se sentent concernés par la culture américaine ».
Article publié dans le numéro de novembre 2016 de France-Amérique.