Le pain des nouveaux Français

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Les boulangers d’origine maghrébine, de plus en plus reconnus en France, s’approprient et perpétuent une ancienne tradition française : la baguette.

Loin du débat politique sur l’immigration qui occupe les esprits en France comme aux Etats-Unis, de nouveaux Français trouvent spontanément leur place dans la société sans que nul ne s’en mêle. On en a eu une démonstration spectaculaire de cette tendance quand ont été publiés les résultats du Grand Prix de la meilleure baguette, un classement des dix meilleurs boulangers de Paris. Sur dix de ces artisans, il apparaît que cinq portent des noms maghrébins qui ne laissent aucun doute sur leur origine : le vainqueur est Mahmoud M’Seddi, un boulanger d’origine tunisienne. Un autre Français d’origine tunisienne, Sami Bouattour, a remporté le prix l’année dernière.

Rien de plus français que la baguette, n’est-ce pas ? Mais ce sont des immigrés d’Algérie, du Maroc et de Tunisie qui désormais la cuisent et la vendent. A cela, quelques explications. Tout d’abord, la boulangerie artisanale est un métier très dur qui exige de travailler la nuit pour que la baguette soit disponible à l’aube. On ne trouve plus guère de personnel franco-français qui accepte cette contrainte. La plupart des boulangers traditionnels ont donc quitté le métier ou se contentent de vendre du pain industriel. La baguette est décongelée sur place, parfois cuite sur place. La pâte, qui contient de la levure de synthèse et non du levain naturel, est distribuée en vrac par camion. Le résultat est médiocre.

Pour les immigrés qui cherchent à s’insérer dans la société française, il y a là un marché à saisir : les boutiques sont à racheter pour pas cher. De jeunes Maghrébins en quête d’un travail honorable acceptent de reprendre le labeur du mitron, pénible on l’a dit, mais correctement rémunéré et à l’abri du chômage, car la demande des Parisiens pour le bon pain reste au beau fixe. C’est ainsi qu’en pétrissant selon des normes anciennes, les nouveaux Français deviennent de vrais Français. Tel a toujours été, en France et aux Etats-Unis, le cycle de l’immigration.

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