L’UE autorise 19 OGM, au grand dam de la France et des écolos

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L’Union européenne a autorisé vendredi l’importation et la commercialisation de 19 OGM, sans attendre l’accord des Etats membres sur sa proposition de réforme leur permettant de les interdire sur leur territoire, au grand dam de la France et des écologistes.

L’autorisation concerne 17 organismes génétiquement modifiés (OGM) destinés à l’alimentation animale et humaine, et deux fleurs. L’eurodéputé écologiste français José Bové s’est déclaré « scandalisé » par cette décision, et a appelé le Premier ministre français, Manuel Valls, à « se montrer très ferme en interdisant ces OGM en France ». La France, via sa représentation permanente à Bruxelles, a officiellement dénoncé cette décision. « Dix-sept OGM alimentaires autorisés par la Commission sans attendre un accord du Conseil et du Parlement européen sur sa proposition de réforme, ça signifie qu’elle est inutilisable et donc que c’est une fausse option », a jugé sur Twitter l’ambassadeur adjoint Alexis Dutertre.

Onze produits de la multinationale américaine Monsanto – plusieurs variétés de soja, maïs, colza et coton – figurent au nombre des OGM autorisés. Les huit autres sont des produits de la firme américaine Dupont et des groupes allemands Bayer et BASF. Ces autorisations « étaient en suspens » car les Etats membres ne sont pas parvenus à constituer une majorité pour ou contre leur commercialisation, ce qui n’a pas laissé d’autres choix à la Commission que de donner son feu vert. L’autorisation est immédiate et vaut pour dix ans. Elle s’impose à tous les Etats, y compris à ceux qui ont voté contre.

La réforme des règles d’importations des OGM proposée mercredi par la Commission prétend contourner ce problème. Elle offre la possibilité aux Etats d’interdire sur leur territoire l’utilisation des OGM autorisés à l’importation. Cette proposition a fâché à la fois les Etats-Unis, l’industrie et les anti-OGM. « C’est difficile de concilier cette proposition avec les obligations de l’Union européenne », a soutenu vendredi le représentant adjoint américain pour le Commerce, Dan Mullaney.

La proposition de Bruxelles doit obtenir l’accord des Etats membres de l’UE et du Parlement européen, ce qui peut prendre un certain temps. En cas de désaccord, les règles applicables seront celles qui ont conduit Bruxelles à autoriser vendredi la commercialisation des OGM, si l’Agence européenne pour la sécurité des aliments (EFSA), déclare qu’ils ne présentent aucun risque pour la santé animale et humaine. Cette solution convient aux grands groupes du secteur.

‘Se débarrasser du stock’

Le président de la Commission, Jean-Claude Juncker, « voulait se débarrasser du stock », a confié un responsable européen impliqué dans le dossier. « Il a fait sa proposition et a lancé les autorisations sans attendre que les Etats prennent position. Si sa proposition est rejetée, il aura beau jeu de dire qu’il a présenté une solution et que les Etats et le Parlement ne sont pas capables de s’entendre », a-t-il expliqué. Les écologistes n’ont pas mâché leurs mots. « Jean-Claude Juncker se couche devant le lobby des entreprises transgéniques. Il se moque des consommateurs européens qui depuis le début sont opposés aux plantes transgéniques », a lancé José Bové. « Jean-Claude Juncker n’a pas l’intention de rapprocher l’Europe des citoyens, comme il l’a promis, mais au contraire d’agir en faveur des intérêts des Etats-Unis et de Monsanto », a dénoncé Greenpeace.

Les représentants du secteur ont en revanche salué une mesure très attendue. « Les éleveurs européens utilisent beaucoup les produits des cultures génétiquement modifiées pour l’alimentation de leur bétail, et il est important de leur accorder la liberté du choix », a affirmé l’association européenne EuropaBio. « Il y a plus de 40 demandes d’OGM supplémentaires pour l’importation encore en suspens dans le système », a insisté l’association des producteurs de biotechnologies, qui représente notamment les intérêts de Monsanto et Bayer.

La décision porte à 75 le nombre des OGM pour l’alimentation animale et humaine autorisés à l’importation pour la commercialisation dans l’UE. Un seul OGM est actuellement autorisé pour la culture, le maïs MON810 de Monsanto. Le tourteau de soja est la principale source de protéines pour le bétail. L’UE en a importé 18,5 millions de tonnes en 2013, selon les données de la Commission. 90% des importations proviennent de quatre pays – Etats-Unis, Brésil, Argentine et Paraguay – et sont génétiquement modifiés.