French America

Les racines françaises de New Rochelle

De nombreuses régions, villes, montagnes et rivières aux Etats-Unis portent des noms français. Ces toponymes témoignent de l’héritage français en Amérique du Nord. Chaque mois, l’auteur franco-américain Anthony Lacoudre décortique leurs racines. Ce mois-ci, l’une des plus anciennes villes de l’Etat de New York, fondée par des protestants français au XVIIe siècle.
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© Mathieu Persan

En 1654, l’Anglais Thomas Pell achète à la tribu siwanoy une parcelle sur les rives du golfe de Long Island, à 30 kilomètres au nord-est de New York City, qui deviendra le domaine de Pelham Manor. A partir de 1685, date de révocation de l’Edit de Nantes par Louis XIV, des milliers de protestants français – les huguenots – fuient les persécutions et trouvent refuge outre-Atlantique.

Le neveu de Thomas Pell, John Pell, devenu lord de Pelham Manor, reçoit alors l’ordre du roi d’Angleterre Guillaume III de vendre des terres aux Français. En 1689, il cède 2 400 hectares de son domaine à 33 familles moyennant la somme de 1 675 livres et le versement d’une taxe héritée des obligations féodales : un veau gras par an !

Pour la plupart originaires de la province de l’Aunis (l’actuelle Charente-Maritime) et ayant fui la France depuis le port de La Rochelle, les premiers colons donnent au village qu’ils fondent le nom de « La Nouvelle-Rochelle ». En 1692 est érigée une église en bois, dont le premier pasteur fut David de Bonrepos. Proche de ce site sera plus tard construite l’église de la Trinité-Saint Paul : elle se dresse toujours au 311 Huguenot Street.

Le village compte 692 habitants en 1790, de nombreux Français ayant rejoint la communauté au fil des décennies, mais à cette époque, la langue anglaise s’est déjà imposée : les derniers comptes-rendus municipaux en français seront publiés en 1738. Dans Hudson Park, un monument rappelle le nom des 151 familles françaises associées à l’histoire de New Rochelle : Bouteiller, Flandreau, Lamoureux, Sicard, Tourneur… Et depuis le début du XXe siècle, des échanges entre New Rochelle et La Rochelle entretiennent l’histoire des huguenots.

Parmi les descendants directs des protestants français exilés, on retrouve deux des Pères fondateurs des Etats-Unis : Henry Laurens, président du Congrès continental, et John Jay, signataire du traité de Paris de 1783. Leurs grands-pères respectifs, André Laurent et Auguste Jay, se sont réfugiés à Charleston, en Caroline du Sud.


Article publié dans le numéro de décembre 2022 de France-Amérique. S’abonner au magazine.