La Paix Impossible est le sixième volet de la série de documentaires historiques Apocalypse, sur les conflits du XXe siècle. Entièrement réalisés à partir d’images d’archives, restaurées et remises en couleur, ces deux épisodes de 45 minutes racontent l’entre-deux-guerres et la montée des nationalismes. Une production d’Isabelle Clarke et de Daniel Costelle, avec la voix de Mathieu Kassovitz. Entretien.
France-Amérque : Pourquoi surnommez-vous la période 1918-1926 “la paix impossible” ?
Isabelle Clarke et de Daniel Costelle : “La guerre était finie… mais elle n’était pas finie : seulement, nous ne le savions pas.” Cette citation de l’écrivain autrichien Stefan Zweig résume bien ce moment. La fin de la Première Guerre mondiale ne fut pas une victoire. A peine a-t-on fêté l’armistice que l’on assiste à l’écroulement des grands empires, qui attise les volontés d’indépendance et entraîne la montée des nationalismes. Hitler, Franco et Mussolini émergent. Cette période est une convalescence, qui enfante une autre guerre. Cette “paix impossible” fait écho à ce que l’on vit aujourd’hui, avec la montée des extrêmes et du populisme.
Le tableau que vous brossez n’est pourtant pas si noir ?
Il y a l’histoire des traités, et celle des individus. Les destructions, et l’insouciance des gens qui sortent de ces quatre années de guerre, qui pensent que leurs enfants vont être heureux et qui n’ont qu’une envie : oublier la guerre et danser. Les années 1920 sont aussi celles des années folles, du charleston, de Josephine Baker…
Pourquoi montrer l’entre-deux-guerres en couleur ?
Notre première passion, avant même l’histoire, est le cinéma. Nos documentaires ne contiennent pas d’interviews, de scènes de reconstitution ou d’images de fiction. Nous les pensons comme des longs-métrages, avec un sens de la dramaturgie et des rebondissements. Ce volet raconte une époque de grande modernité, d’où notre envie de la montrer en couleur, et non en noir et blanc. Nous ne racontons pas l’histoire des gens au passé, mais leur présent dans le passé. Les couleurs sont au service du décryptage de l’histoire ; elles permettent de redécouvrir les détails et de leur donner un sens. Elles renseignent les plans. Qu’il s’agisse de l’uniforme bleu des soldats français ou des drapeaux, elles aident à la compréhension ou apportent un élément de véracité historique.
Comment redonnez-vous vie aux images ?
Nous récupérons des pellicules muettes et en noir et blanc, que nous restaurons. Notre équipe crée une bande sonore à partir ce que l’on peut y observer (une foule, un canon) et de ce qu’on devine (le vent, un combat au loin…). Si on observe une voiture, nous ajoutons le bruit du moteur d’époque qui correspond. Le son, comme la couleur, est un élément historique. Nous vérifions aussi chaque teinte, des façades aux tenues officielles, auprès des musées et des archives.
Ce documentaire est principalement composé d’images inédites. D’où proviennent-elles ?
Nous utilisons une cinquantaine de sources d’images différentes, venues de France, des Etats-Unis, du Canada, de Serbie, d’Italie, d’Espagne,… Certaines sont “officielles”, comme les images prises par les services de l’armée, qui ont filmé les scènes de déminage de la France. D’autres sont issues des actualités cinématographiques : ce sont les événements officiels filmés par les cameramen de Pathé. En recherchant systématiquement les pellicules originales, on tombe sur des scènes inédites, tel le maréchal Foch dansant avec des chefs Amérindiens, que l’on a envie de faire découvrir ! Les pellicules amateur tournées par les détenteurs des premières caméras livrent aussi des scènes familiales touchantes.
Vos documentaires ont-il vocation à transmettre la mémoire de la guerre ?
Ce qui entraîne de nouvelles guerres, c’est l’oubli des précédents conflits. Pour lutter contre une image romantique de la guerre, où l’on chargerait sabre au clair, il est nécessaire de montrer la réalité avec force : les cadavres, les destructions, le sang… Nous voulons rendre évidente, avec réalisme, l’horreur profonde de ces apocalypses et prouver qu’il faut tout faire pour les éviter. Nous avons un devoir de mémoire et de transmission. Avec les précédents volets d’Apocalypse, nous avons touché un large public, jeune et curieux, de tous les pays. Des personnes qui ne regardaient pas forcément la télévision. En racontant aux gens leur histoire, ils peuvent comprendre d’où ils viennent, comprendre le présent et se projeter dans le futur.
=> Ce documentaire sera diffusé pour la première fois sur TV5MONDE le mercredi 14 novembre à 20h30 EST et rediffusé le samedi 17 novembre à 4h EST.
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