La révolution du rosé

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Le rosé a rapidement gagné en popularité auprès des amateurs de vin, se taillant une place à égalité à côté des vins blancs et rouges. Les Etats-Unis, deuxième plus grand consommateur de rosé après la France, importent de plus en plus de rosé de Provence. En France, les ventes de rosé ont dépassé celles de vin blanc, secouant sérieusement l’industrie viticole. Toutefois, le rosé a longtemps été méprisé et avait la réputation d’être un vin qui manque d’élégance et cause de terribles maux de tête.

Le documentariste américain Ken Kobré, un professeur de journalisme à San Francisco State University qui passe ses étés en France depuis quinze ans, s’est penché sur l’essor de la production et des ventes de rosé en Provence, dans la vallée de Napa, en Afrique du Sud et en Italie. Son film, La Révolution du Rosé: How a Ridicule Wine Became a Winner, sera disponible sur iTunes à partir du 11 août.

France-Amérique : Pourquoi le rosé avait-il si mauvaise réputation ?

Ken Kobré : Selon le responsable d’une association viticole en Provence, cette réputation remonte à 1936, l’année des premiers congés payés en France. Nombre de Parisiens partirent alors en vacances dans le sud de la France où ils découvrirent le rosé. Les bistrots parisiens, à qui l’on commença à réclamer du rosé, durent en faire venir de Provence. Mais pour que le vin se garde pendant le transport, les producteurs y ajoutèrent du sulfite, ce qui donna aux consommateurs de violents maux de tête. C’est ainsi que le rosé acquit sa réputation de vin frelaté. Aux Etats-Unis, les premiers rosés étaient inspirés de vins doux portugais. Le résultat, le Zinfandel Blanc, est un vin doux et sucré dont la saveur rappelle le jus de fruits et dont se moquent tous les connaisseurs.

Malgré ces opinions et critiques défavorables, comment le rosé est-t-il devenu aussi populaire ?

Dans les années 1960 et 1970, de riches entrepreneurs investirent en Provence et rachetèrent des domaines avec l’intention de produire un meilleur vin. Ils engagèrent de jeunes viticulteurs qui innovèrent et plantèrent différents cépages spécifiquement destinés à la production de rosé, améliorant ainsi le goût du vin. Par ailleurs, on commença à trouver du vin dans les supermarchés. A l’origine, le vin était acheté chez les cavistes et par les hommes. Les femmes, qui faisaient la majorité de leurs courses dans les supermarchés, découvrirent le rosé et se mirent à en acheter de plus en plus. C’est l’une des causes de cette révolution.

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Récolte du raisin qui servira à produire le rosé, une spécialité provençale. © Ken Kobré

En quoi le marketing contribua également à améliorer l’image du rosé ?

Il existe 700 sortes de rosé en Provence uniquement. La publicité traditionnelle à la télévision et dans les magazines n’est pas efficace pour promouvoir une seule marque et s’avère trop chère pour les petits producteurs. Pour faire découvrir leurs produits, les viticulteurs participent à des évènements autour du vin, comme des dégustations ou des festivals. Aux Etats-Unis, ce type d’évènements attirent principalement de jeunes femmes, mais en Provence, la consommation de rosé est plus homogène. Ce n’est ni la boisson de prédilection des personnes âgées ni des plus jeunes ; c’est une boisson appréciée par tous. Comme les entreprises viticoles vendent elles-mêmes une importante part de leurs vins, récemment, la tendance est d’associer les caves à des manifestations artistiques et musicales ou à un restaurant. On parle aujourd’hui de tourisme œnologique, ou œnotourisme. Cette mode, lancée en Afrique du Sud, s’est propagée aux Etats-Unis et fait maintenant son apparition en France.

D’autres facteurs influencent-ils les ventes de rosé ?

Le prix, l’emballage et les récompenses ont leur importance. L’un des aspects les plus surprenants est que les médailles sont souvent attribuées aux vins de façon aléatoire, bien qu’un vin médaillé voie ses ventes doubler. Angelina Jolie et Brad Pitt ont acheté le château Miraval en Provence pour y fabriquer leur propre rosé, qui écoule maintenant des millions de bouteilles. A la minute où ils l’ont acheté, ce vin a vu son importance décupler. Il est devenu le premier rosé à entrer dans le classement des cent meilleurs vins du magazine Wine Spectator.


Le saviez-vous ?

Contrairement à la croyance populaire, le rosé ne résulte pas du mélange de vin rouge et de vin blanc ! Le jus de raisin rouge est laissé en contact avec la peau du raisin écrasé (le moût) pendant plusieurs semaines, ce qui lui confère sa couleur foncée et son arôme prononcé. Pour le rosé, en revanche, le jus reste en contact avec la peau du raisin pendant moins longtemps, entre deux et six heures. Le vin obtenu est donc plus clair et a un goût plus léger.

=> www.larevolutiondurose.com