Griffonnés sur une table, placardés dans la rue, scandés pendant les manifestations, les slogans de Mai 68 font partie de la culture populaire française. A l’occasion du cinquantième anniversaire des « évènements », un recueil de ces slogans a été traduit en anglais et publié par les presses du Massachusetts Institute of Technology (MIT).
L’esprit de mai a disparu, mais ses cris de ralliement demeurent. Ils sont inscrits dans notre mémoire grâce au travail de Julien Besançon. En mai 1968, le journaliste a trente-six ans. Il a déjà couvert la guerre d’Algérie, les funérailles de J.F.K. et la guerre des Six Jours pour la station de radio Europe n°1 lorsqu’éclatent à Paris les premières manifestations. Il couvrira les cortèges, les barricades, les charges de C.R.S. et consignera les slogans des manifestants. Son recueil de citations, Les murs ont la parole : Mai 68, sera publié moins de trois semaines après le retour à l’ordre.
Les presses du MIT ont choisi de rééditer ce recueil dans son format original et de le traduire en anglais. Le traducteur américain Henri Vale est à l’origine du projet. Il avait déjà traduit plusieurs pages du recueil de Julien Besançon en 1998, lorsqu’il était étudiant à la State University of New York à Buffalo. Il se souvient avoir comparé l’austérité de son campus à celui de Nanterre, d’où est parti le soulèvement parisien, et avoir été inspiré par l’optimisme des manifestants.
Henri Vale a depuis traduit les œuvres de Gérard de Nerval, de Raymond Queneau et de Georges Perec. Les expressions de 1968 ont toutefois posé un défi : comment rendre l’urgence et la créativité de ces phrases nées du contexte politique et culturel français des années 1960 ? Certains slogans ont été traduits littéralement (Sous les pavés la plage : Under the paving stones, the beach ; L’imagination au pouvoir : All power to the imagination ; Il est interdit d’interdire : Banning is banned). D’autres sont resté en français. C’est le cas de « Contestation, mais con d’abord » ou de l’intraduisible « Des veaux, dévots, des votes ».
En français comme en anglais, les slogans brillent par leur universalité. Nul besoin de connaître l’histoire de France pour apprécier « Nous sommes tous des indésirables » ou « Soyons réalistes, exigeons l’impossible ». « Chaque nouvelle décennie nous éloigne un peu plus du climat de l’époque », explique le traducteur, « mais les manifestations de 1968 continuent d’influencer notre société : les tweets sont les graffitis d’aujourd’hui ».
The Walls Have the Floor: Mural Journey, May ‘68 de Julien Besançon, traduit du français par Henri Vale, MIT Press, 2018. 202 pages. 14,95 dollars.
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