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The Eddy : la série jazz de Damien Chazelle

Avec la mini-série The Eddy, disponible à partir du 8 mai sur Netflix en France et aux Etats-Unis, le réalisateur de La La Land pose ses valises à Paris, dans la pénombre d’un club de jazz.
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Tahar Rahim (à droite) et André Holland dans le premier épisode de The Eddy. © Netflix

Ils sont loin les palmiers inondés de soleil et les farandoles d’Emma Stone et Ryan Gosling. Pour cette série en huit épisodes, le Franco-Américain Damien Chazelle a troqué Hollywood pour le 12e arrondissement de Paris – à mille lieux du Caveau de la Huchette et des légendaires clubs de jazz de Saint-Germain-des-Prés. On y suit le pianiste afro-américain Elliot Udo (André Holland, aperçu dans Selma et Moonlight), gloire fatiguée du label new-yorkais Blue Note, qui dirige tant bien que mal une boîte de jazz, The Eddy, avec son ami arabe Farid (Tahar Rahim, révélé dans Un Prophète de Jacques Audiard).

Sur scène comme en coulisse, tout va de travers. Les musiciens du groupe maison se disputent, la chanteuse manque un concert, Elliot doit soudainement s’occuper de sa fille ado qui arrive de New York et le club est racketté par des malfaiteurs… Cinéaste érudit, Chazelle s’inspire du cinéma vérité des années 1960 et des drames de John Cassavetes pour filmer le Paris d’aujourd’hui, entre cités et quartiers gentrifiés. En témoignent les images tournées en 16 millimètres (une première pour Netflix) par Eric Gautier, collaborateur d’Olivier Assayas et d’Arnaud Desplechin, et ses rapides mouvements de caméra.

Sans oublier la musique, l’autre passion de Damien Chazelle. Déjà en 2014, il mettait en scène avec Whiplash un éprouvant duel, sur fond de percussions jazz, entre un jeune batteur et son professeur. Tel un personnage invisible dans la série, les compositions de Glen Ballard – célèbre pour son travail avec Michael Jackson et Alanis Morissette et lauréat de six Grammy – enveloppent chaque interaction. Des morceaux confiés aux jazzmen américains Josiah Woodson et Robby Marshall, recrutés à Paris pour incarner leur propre rôle, et joués en live sur le plateau de tournage. La démarche rappelle l’excellente série américaine Treme, qui mêle acteurs et musiciens locaux pour peindre la reconstruction de La Nouvelle-Orléans post-Katrina.

On écoute du jazz dans The Eddy bien sûr, du bebop en hommage à Charlie Parker, Miles Davis et Dizzy Gillespie, quelques références plus modernes au pianiste Keith Jarrett, mais aussi du jazz entrecoupé de rap. Dans la cité, des jeunes en jogging écrivent en français le futur de ce genre musical importé des Etats-Unis. « Ce n’est pas une passion de vieux », déclarait Damien Chazelle à Vanity Fair pendant le tournage. « Il y a des jeunes à Paris qui fréquentent ces clubs [de jazz] et veulent pousser cette musique vers le futur. »


Article publié dans le numéro de mai 2020 de France-AmériqueS’abonner au magazine.