Le réalisateur Robin Campillo retrace le combat des militants d’Act Up-Paris, créé en 1989 sur le modèle de l’association new-yorkaise de lutte contre le sida. Grand Prix du Jury à Cannes, le film choisi pour représenter la France aux Oscars 2018 sortira en salles américaines le 20 octobre.
Nous sommes au début des années 1990. La trithérapie n’existe pas encore. Etre atteint du sida, c’est mourir à brève échéance. Face à l’indifférence du gouvernement français et à la lenteur des laboratoires pharmaceutiques, les militants d’Act Up-Paris se lancent à corps perdu dans l’activisme. L’objectif : faire accélérer les recherches, informer l’opinion publique et secouer les tabous liés à la sexualité et à la drogue. Certains sont déjà malades, d’autres seulement porteurs du virus. Homosexuels, hétérosexuels, hémophiles contaminés… en dépit de leurs désaccords, ils placent leur énergie dans ce combat commun.
Pour relater l’histoire de cette lutte acharnée contre la maladie et l’hypocrisie de l’époque, Robin Campillo (auteur d’Eastern Boys et du film Les Revenants, adapté en une série à succès aux Etats-Unis) a puisé dans ses souvenirs d’ex-militant de l’association. Evitant l’écueil d’une reconstitution aseptisée, le cinéaste nous plonge au cœur de cet engagement collectif. Entre manifestations de rue et actions spectaculaires, réunions enflammées et virées festives, le film transmet la rage de vivre et l’urgence d’aimer de cette jeunesse en sursis. La parole y a une place de choix : on ne pratiquait pas la langue de bois chez Act Up et les scènes dans lesquelles ses membres débattent et s’affrontent sur la stratégie à adopter sont parmi les plus réussies.
Sans grandiloquence, digne jusqu’au bout, le film impressionne par la qualité de ses dialogues percutants et la fluidité de sa narration. L’aventure collective se resserre peu à peu sur le parcours individuel de Sean (Nahuel Pérez Biscayart) dont la radicalité et la fougue fascinent Nathan (Arnaud Valois), nouvellement arrivé dans le groupe. Autour de ce duo, le rythme du récit ralentit pour saisir l’intimité de leur histoire d’amour à l’issue inéluctable.
Article publié dans le numéro de novembre 2017 de France-Amérique.