Front est installé aux Etats-Unis, mais son idée est née en France. « Il y a un peu plus de deux ans, j’étais responsable commercial dans une entreprise parisienne d’e-commerce », explique Mathilde Collin, 27 ans, diplômée d’HEC et co-fondatrice de Front. « Tout le monde passait son temps à me demander si j’avais bien vu tel e-mail ou répondu à tel autre ; mes collègues n’avaient aucun moyen de savoir si j’avais consulté un e-mail ou non. J’ai fait des recherches pour savoir s’il existait des solutions à ce problème, mais je n’ai rien trouvé. » La jeune femme voit alors une opportunité d’innovation. Avec 2,672 milliards de boîtes e-mail dans le monde, le défi est de taille. « Je me suis dit qu’optimiser les boîtes de réception pourrait changer la manière de travailler de beaucoup de monde. »
Au cours de l’été 2014, Front – alors à l’état embryonnaire – déménage en Californie. La start-up se voit offrir une place au sein de l’incubateur Y Combinator à Mountain View, dans la Silicon Valley. Epaulé par la structure qui a lancé DropBox, Airbnb et Reddit, Front reçoit une précieuse aide technologique et financière. L’application se précise et prend forme.
Front permet à plusieurs membres d’une même équipe de travail de traiter ensemble les messages envoyés à une boîte de réception de type contact@ ou infos@. Un e-mail, par exemple, peut être automatiquement redirigé vers un destinataire particulier en fonction d’une langue ou d’un mot clé comme « remboursement » ou « informations ». Un système de messagerie interne permet également aux membres de l’équipe de se mettre d’accord avant de répondre à un e-mail. « Tout le monde sait qui a lu tel e-mail, qui a répondu à tel autre », commente Mathilde Collin. « Il y a une vraie transparence. »
« Il faut savoir être très convaincant »
Dans la Silicon Valley, la concurrence est rude entre les jeunes start-up qui peinent à se démarquer les unes des autres. Attirer de nouveaux employés n’est pas chose simple. « En France, c’est plus facile d’apparaître comme une jeune start-up dynamique et pleine de promesses : on dit que l’on est passé par un incubateur de start-up et c’est bon. Mais aux Etats-Unis, la plupart des start-up sont dans le même cas que nous », confie la jeune chef d’entreprise. « Il faut savoir être très convaincant. » Front compte aujourd’hui 24 employés : les ingénieurs sont français, mais la majorité des designers, chefs de vente et managers sont américains. Treize nouveaux postes sont déjà à pourvoir.
En mai dernier, Front a opéré une levée de fonds de 10 millions de dollars. La start-up française compte notamment parmi ses investisseurs le co-fondateur de Flickr, le Canadien Stewart Butterfield. « Le nombre de nos investisseurs et de nos clients ne cesse d’augmenter », apprécie Mathilde Collin. « Ils viennent en grande partie de la Silicon Valley. » Pas question de rentrer en France pour le moment : la jeune Française souhaite tout d’abord ancrer sa société aux Etats-Unis !