La meilleure façon d’explorer Paris et ses alentours, c’est sur deux roues. Que vous ayez envie de randonner en forêt de Fontainebleau, de percer le mystère des jardins de Versailles ou de découvrir la vallée de Chevreuse et ses châteaux, les balades à vélo sont une manière plus intime de visiter la région, en toute autonomie. Mais « le cyclisme est un sport qui peut être très intimidant pour les débutants », explique Christian Osburn, copropriétaire du café Le Peloton, dans le Marais. « Lors d’une sortie, vous voyez des passionnés qui ont des vélos coûteux et le matériel assorti. Nous voulions un endroit accueillant pour les débutants. » Christian Osburn, qui sert parfois ses expressos en cuissard et chaussures de vélo, a quitté la Floride pour s’installer à Paris il y a vingt ans. Lui et son associé Paul Barron, originaire de Nouvelle-Zélande, ont ouvert le café en 2015, dans le prolongement de leur agence Bike About, spécialisée dans les cyclovisites de la capitale. Dès le départ, l’idée de communauté a été au centre de leur projet.
Sara Callon, 32 ans, venue de l’Ohio, s’est installée en France en 2015. Elle a commencé à fréquenter Le Peloton à l’été 2020, après le premier confinement, à la recherche d’interactions humaines. « A force de voir des cyclistes se retrouver avant ou après une sortie, j’ai réservé ma place pour une balade entre débutants, avec un vélo de location fourni par le café », se souvient-elle. « J’ai été conquise. » Laura Fromm, Californienne de 34 ans qui roule maintenant régulièrement avec le Peloton Cycling Club, s’est mise au vélo de route quand elle est arrivée à Paris en 2019. « J’ai déménagé en France pour m’imprégner d’une nouvelle culture et d’une nouvelle langue, mais je n’avais pas imaginé que cela me ferait aussi découvrir le cyclisme », raconte-t-elle. « Vivre à l’étranger m’a placée dans une posture où j’étais plus à même d’accepter les défis et d’élargir mes horizons, y compris quant à mes propres capacités. »
Six mois après son installation à Paris, Laura Fromm s’est retrouvée embringuée dans une sortie de 300 kilomètres jusqu’à Londres, avec Christian Osburn et plusieurs autres habitués du café. Elle était novice, son vélo trop petit, mais elle est tombée amoureuse du sport. Elle a aujourd’hui un vélo Canyon noir aux lignes épurées et une tenue soigneusement choisie aux couleurs assorties, de sa veste en Gore-Tex à ses chaussettes en laine mérinos. Laura Fromm s’est bien adaptée à la vie parisienne et parle couramment français, mais elle apprécie de retrouver un peu de son pays d’origine au café. « C’est agréable de savoir qu’en plein Paris, je peux aller au Peloton n’importe quand, avec l’assurance d’y avoir des conversations dans ma langue maternelle », confie-t-elle. L’aspect multiculturel et multilingue est apprécié par beaucoup des habitués du café, qui disent avoir l’impression de se retrouver à Portland ou à Brooklyn, observe Christian Osburn.
Une communauté chaleureuse et diverse
Pierre Supau, 30 ans, qui est né à Paris et y a grandi, apprécie l’ambiance internationale. « C’est ça qu’on aime au Peloton Café. Des personnes issues de plein de cultures différentes – des Etats-Unis, d’Amérique latine, d’Europe – se retrouvent autour d’une passion commune : le vélo et la nature, et aussi un peu le café ! » Pierre Supeau est venu pour la première fois avec sa femme, Lili, originaire du Turkménistan. Ils ont tout de suite sympathisé avec les réguliers du café, qui leur ont proposé une sortie pendant le weekend. « Nous nous sommes retrouvés à faire 70 kilomètres de vélo avec une super équipe, très accueillante et très diverse », se souvient-il. « Maintenant, dès que nous sommes à Paris le weekend, nous allons rouler avec Le Peloton ! C’est devenu notre club de vélo. J’ai même acheté le maillot floqué aux couleurs du café. »
Pour ceux qui arrivent à Paris depuis l’étranger, le café peut aider à trouver ses marques dans le pays. Une course d’ultra-endurance de 24 heures autour du mont Blanc, avec 10 000 mètres de dénivelé positif, a paru plus facile à Aaron Kroger, 33 ans, que son installation à Paris. A son arrivée en France avec sa femme Anna en 2021, il n’avait jamais mis les pieds dans le pays et ne parlait pas un mot de français. « Le cyclisme était une partie importante de ma vie à Los Angeles et je craignais de devoir y renoncer, compte tenu de toutes les barrières que je m’étais créées en déménageant », explique-t-il. Au Peloton, il a rencontré une communauté multiculturelle et accueillante qui partage sa passion. En juin 2022, il a même convaincu plusieurs coureurs du café, dont Christian Osburn, de rouler depuis Paris jusqu’au Mont-Saint-Michel – un parcours de 370 kilomètres accompli en une seule journée ! « Le café est dédié au cyclisme sur route, mais pas de façon élitiste comme c’est souvent le cas. Le concept de communauté reste au cœur du projet. »
Pendant la saison cycliste, Le Peloton diffuse en direct les grandes courses, dont le Tour de France, Paris-Nice et Paris-Roubaix, grâce à un vidéoprojecteur installé sur le mur de briques au centre du café. Pour promouvoir la culture du cyclo, Paul Barron et Christian Osburn s’associent également à d’autres organisations. En juillet 2022, ils ont participé au lancement du Tour de France Femmes, le premier depuis 1989. Le sponsor principal, Zwift, a organisé une reconnaissance du parcours à partir du café, la veille du départ de la course. « C’était vraiment important de contribuer au premier Tour féminin depuis trente ans », estime Christian Osburn. Un groupe de cyclistes du café a ensuite parcouru la dernière étape, qui s’est achevée dans les Vosges avec l’ascension emblématique de la Super Planche des Belles Filles. Un défi bienvenu après le terrain relativement plat de la région parisienne. Le club espère maintenant organiser d’autres échappées en montagne, dans les Pyrénées ou en Provence, au mont Ventoux, autre rendez-vous incontournable des amoureux de la petite reine.
Tous les ans en juin, Le Peloton organise également une course caritative de 100 kilomètres au profit de l’initiative Pedal to Empower de l’association World Bicycle Relief, qui vise à inciter davantage de femmes et de jeunes filles à enfourcher une bicyclette, en particulier dans les pays en développement. « Avoir accès à un vélo a des répercussions considérables sur la vie quotidienne des gens », indique Christian Osburn. « On peut plus facilement aller chercher de l’eau et de la nourriture et se déplacer. C’est un excellent moyen de rassembler la communauté autour d’une grande cause. » Cette année, la cyclosportive, qui se déroulera le 3 juin 2023, ralliera Paris à Fontainebleau, avec des groupes de différents niveaux. La course est ouverte à tous, même ceux qui n’ont jamais pédalé pendant 100 kilomètres. « Le vélo permet de vivre durablement dans une métropole comme Paris », explique Laura Fromm, « et la communauté avec laquelle je roule donne tout son sens à cette activité ».
Article publié dans le numéro de juin 2023 de France-Amérique. S’abonner au magazine.