Portrait

François Perret, sur la route de la pâtisserie américaine

Un grand chef quitte une cuisine réputée pour prendre le volant d’un food truck. C’est le synopsis du film #Chef, de et avec Jon Favreau. C’est aussi celui de la série de Netflix The Chef in a Truck, qui a suivi pendant deux semaines le pâtissier François Perret, vedette du Ritz, dans une odyssée sucrée en Californie.
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© Eagles Team Entertainment/HK Corp/Wild Bunch

François Perret aime « sortir de sa zone de confort » mais il avait pourtant deux craintes en s’envolant pour Los Angeles. D’abord, comment se débrouiller sans parler anglais ? Et où trouver le beurre et la crème de Bresse, sa région natale, qu’il aime tant et utilise dans la plupart de ses recettes ? Sa cuisine est audacieuse – en témoigne sa relecture de la célèbre madeleine, un « nuage » fourré à la compote de fruits, au miel, au chocolat ou au caramel. Mais ce périple en Californie, c’était pour le chef angoissé « une petite mise en danger», « la découverte d’un pays que ne je connais pas ».

Abandonner le Ritz et les 35 employés de sa brigade, s’installer avec deux commis dans un food truck et sillonner le sud de la Californie à la recherche des meilleurs desserts : c’est le défi que lui lance en 2018 le réalisateur et producteur français Eric Nebot, administrateur de l’American Cinematheque à Los Angeles et gourmand invétéré. « J’ai trouvé l’idée tellement folle que je n’y croyais même pas », se souvient François Perret, élu meilleur pâtissier du monde en 2019. « Mais je savais que ce voyage allait me nourrir. »

Après un dernier repas gastronomique sur Air France – caviar, endives grillées, foie gras poêlé– voici le pâtissier au « pays de la malbouffe». C’est aussi le but de l’expérience, défaire les clichés éculés sur l’Amérique et débarrasser le Ritz de son image empesée. Première étape : un quartier industriel de South Los Angeles, où Teddy Vasquez a garé son camion de tacos. Ancien chauffeur pour Uber, il pilote maintenant une équipe de six cuisiniers et régale 300 clients par jour. Une révélation pour les Français, qui découvrent ensuite leur propre cuisine sur roues, une boîte noire flanquée du logo du Ritz.

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© Eagles Team Entertainment/HK Corp/Wild Bunch

L’espace est réduit – moins de sept mètres carrés. Les trois pâtissiers se marchent sur les pieds. Ils se démènent pour caser le four à vapeur, une requête du chef, mais la presse à panini ne rentre pas. Et le vent souffle les flammes du piano de cuisson ! « Je me suis adapté, j’ai trouvé des astuces », explique François Perret. « Il faut être bien organisé quand on travaille dans un camion. On ne peut pas se permettre d’oublier un ingrédient ou un ustensile. Mais je me suis vite rendu compte que quand on sait faire du bon, on y arrive dans toutes les circonstances. »

Un « réveil » culinaire

Au fil des kilomètres et des rencontres, le regard des Français change. François Perret, passé par les cuisines du George V et du Meurice avant d’arriver au Ritz, reste dubitatif devant une tarte aux corn flakes multicolores. Mais il retombe en enfance en découvrant le rituel américain du cookie trempé dans un verre de lait : « C’est un geste universel ! En France, on fait ça avec une madeleine. » Partout où il va, au marché de Santa Monica, chez un glacier de Venice Beach, chez un apiculteur, dans une ferme laitière ou chez un producteur de pistaches de la Central Valley californienne, il retrouve cette même passion pour le terroir et les ingrédients de qualité.

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© Bernhard Winkelmann/Flammarion
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© Bernhard Winkelmann/Flammarion

« J’avançais en aveugle, mené par la production, et je m’inspirais chaque jour de la forme des desserts américains pour créer de nouvelles recettes françaises », témoigne-t-il. Une spontanéité qui a donné naissance, entre autres, à un s’more à base de pâte à chou, une salade de fenouil avec des oranges et du riz au lait (voir recette plus bas), un taco sucré aux asperges et aux citrons confits, un autre taco sur une base de brioche avec purée de maïs et confiture de piments et un ice cream sandwich à la mousse de fromage blanc, aux amandes caramélisées et au miel. « Ce voyage m’a réveillé et donné énormément d’idées ! »

A tel point que le pâtissier s’est inspiré de son expérience pour publier à son retour un livre de recettes et ouvrir Le Comptoir, une pâtisserie sur l’envers du Ritz, rue Cambon. Outre ses desserts traditionnels, on y trouve des croissants, pains au chocolat, mille-feuilles et sandwiches en forme de flute, influencés par la finger food américaine, et même des gâteaux à boire. « A Los Angeles, tout le monde marchait dans la rue avec un gobelet en main. J’ai donc créé une version liquide de mon cake marbré, de ma madeleine et de ma barquette aux fraises. Ce n’est pas le contenant qui prime, mais ce qu’on met dedans. Il ne faut pas avoir peur de bousculer les traditions françaises ! »

 

La série The Chef in a Truck est désormais disponible en VOD sur Google Play ainsi qu’en DVD.

The Chef in a Truck : La fabuleuse odyssée culinaire d’un pâtissier français en Californie de François Perret et Eric Nebot, Flammarion, 2021.

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© Bernhard Winkelmann/Flammarion

Salade de fenouil

Ingrédients (pour 4 personnes)

Pour la vinaigrette :
100 ml d’huile d’olive
40 ml de vinaigre de calamansi ou autre vinaigre de citron
40 ml de Pacific (pastis sans alcool)
40 g de sucre glace

Pour le riz au lait d’avoine :
10 g de maïzena
30 g de cassonade
150 g de riz à risotto
1 l de lait d’avoine

Pour la marmelade d’oranges (facultatif) :
500 g d’oranges
250 g de sucre semoule
4 g de pectine de fruits (c’est mieux, mais optionnel)

Pour la salade :
2 bulbes de fenouil
Le jus d’un citron
500 g de sorbet au citron
10 dattes, dénoyautées et tranchées finement (facultatif)
2 grosses oranges, épluchées et coupées en quartiers
20 olives taggiasche (facultatif)
1 bouquet d’aneth
Fleurs de bourrache
Fleur de sel et poivre moulu

Préparation

Préparer la vinaigrette :
1. Mélanger tous les ingrédients au fouet puis réservez.

Préparer le riz au lait d’avoine :
1. Mélanger la maïzena et le sucre.
2. Faire blanchir le riz pendant 2 minutes dans de l’eau bouillante puis le rincer à l’eau froide.
3. Pendant ce temps, verser le lait d’avoine dans une grande casserole et le chauffer à feu doux ; cela doit juste frémir. Ajouter le riz et faire mijoter jusqu’à ce que le riz soit tendre (environ 15 minutes). Ajouter le mélange maïzena/sucre et donner une courte ébullition. Le riz doit être bien crémeux.

Préparer la marmelade d’oranges :
1. Piquer les oranges plusieurs fois à l’aide d’une fourchette. Les plonger dans une casserole avec suffisamment d’eau froide pour les recouvrir et porter à ébullition. Répéter l’opération 8 fois en changeant l’eau à chaque fois.
2. Couper ensuite les oranges en quartiers et retirer les pépins. Mixer les quartiers à l’aide d’un robot ménager, transférer dans une casserole et faire cuire avec le sucre et la pectine (si vous en utilisez) pendant 2 minutes. Laisser refroidir.

Assembler la salade :
1. Trancher finement les bulbes de fenouil à l’aide d’une mandoline et ajouter le jus de citron pour empêcher les tranches de s’oxyder.
2. Déposer une cuillère à café de marmelade d’oranges (pas plus, car elle sucre beaucoup) au fond de chaque assiette. Ajouter le riz au lait, une boule de sorbet au citron et les dattes en tranches (si vous en utilisez).
3. Répartir enfin les tranches de fenouil entre les assiettes, ainsi que les quartiers d’oranges. Assaisonner de vinaigrette, de fleur de sel et de poivre du moulin et décorer avec quelques olives (si vous en utilisez), un peu d’aneth et des fleurs de bourrache avant de servir.

Le conseil du chef

« C’est une recette que nous avons testé dans le camion. A ce moment-là, je n’étais pas vraiment convaincu que ça marcherait. A mon avis, vous ne devriez pas mettre les dattes, la marmelade ou mêmes les olives, et ajouter à la place de beaux quartiers d’oranges. La salade sera plus fraîche et, à mon avis, beaucoup plus agréable ! Enfin, un peu de fleur de sel et un tour de moulin à poivre feront leur effet à la dégustation. »

 

Article publié dans le numéro de juillet 2022 de France-Amérique. S’abonner au magazine.