Young Leader

Stéphanie de Boüard-Rivoal, l’âme de Château Angélus

À 38 ans, Stéphanie de Boüard-Rivoal est aux commandes d'un des domaines les plus réputés au monde : le Château Angélus, premier grand cru classé A, à Saint-Emilion. Quand elle ne travaille pas la vigne, cette femme distinguée en 2017 par la French-American Foundation comme Young Leader, dirige ses deux établissements culinaires : le Logis de la Cadène – l’un des plus anciens hôtels-restaurants de Saint-Emilion, étoilé au Michelin – et Le Gabriel, à Bordeaux.
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© Michäel Boudot

France-Amérique : Qu’est-ce que l’Angélus, qui donne son nom à votre château ?

Stéphanie de Boüard-Rivoal : L’angélus est une prière catholique, célébrée trois fois par jours, à 7h, à 12h et à 19h. C’est aussi une prière populaire qui au cours des siècles a rythmé les journées de centaines de millions de paysans, de laboureurs, de tâcherons, de vendangeurs, et qui à ce titre a une symbolique terrienne et rurale saillante que retranscrit de manière sublime le célèbre tableau de Millet, L’Angélus, qui rend presque palpable l’humilité et la dévotion d’un couple de paysans au milieu de leur champ. Au cœur du vignoble d’Angélus, où les sons s’amplifient, on pouvait entendre les cloches sonner l’angélus matin, midi et soir. La cloche figurant sur l’étiquette de la bouteille de Château Angélus symbolise cette origine et ce moment de recueillement.

Que représente pour vous le marché et la culture américaine du vin ?

Le marché américain compte pour près de 30 % dans la distribution de nos vins et a soutenu l’ascension de notre propriété dès les années 1980, accordant plus d’importance à la qualité et à la dynamique en cours qu’aux classements anciens, qui avaient alors perdu de leur pertinence. Nos pays sont différents par bien des aspects, mais ils ont un socle historique et culturel communs, des sensibilités qui se répondent. Les Etats-Unis doivent beaucoup à des personnages comme Montesquieu (un Bordelais !), Lafayette ou Tocqueville, et la France ne doit pas moins à des personnages comme Benjamin Franklin, Thomas Jefferson (un passionné de vins de Bordeaux !) ou, plus récemment, à Dwight Eisenhower.

Une anecdote amusante sur l’Amérique ?

C’est à Seattle que j’ai eu l’occasion de déguster le plus vieil Angélus qu’il m’ait été donné de goûter : un importateur américain voulant me faire plaisir et, supposant à juste titre que je n’avais pas goûté ce millésime, m’avait servi un 1928 qui était aussi délicieux qu’émouvant !


Entretien publié dans le numéro d’octobre 2020 de France-AmériqueS’abonner au magazine.